Le principe du management visuel pourrait être résumé par cette phrase restée célèbre de Napoléon Bonaparte : « Un bon croquis vaut mieux qu’un long discours. », ou comment lorsqu’on est supposé manager une équipe, il est préférable de faire passer les informations par des moyens schématiques et des indicateurs visuels.
Le terme « Lean » qui signifie littéralement en anglais « maigre » ou « dégraissé », sert à désigner une méthode de gestion de la production qui vise à piloter une gestion « sans gaspillage », ou « gestion allégée ». Ce concept est né au Japon sur les lignes de production des usines Toyota, où on cherchait à éliminer les multiples gaspillages : surproduction, attentes, transports, étapes inutiles, stocks, mouvements inutiles, retouches. Le Lean est actuellement implanté principalement dans l’industrie automobile, bien qu’on puisse considérer qu’il est adaptable à tous les secteurs économiques.
Le management visuel quant à lui, en anglais « visual management », est une terminologie regroupant plusieurs méthodes de Lean management centrées sur la perception visuelle. Il s’agit de mieux communiquer, en mettant en oeuvre un management transversal et un travail collaboratif. Difficile de cerner les domaines d’application du management visuel, puisqu’en pratique presque tous les domaines de l’entreprise peuvent être pilotés visuellement, du moment que les indicateurs choisis sont pertinents ! Dans des entreprises où de plus en plus les leaders sont ensevelis sous les informations, et peinent à les répercuter avec efficacité, le management visuel s’impose comme une solution d’intelligence collective concernant à la fois la hiérarchie et les équipes opérationnelles : chacun mettant à la disposition de tous les données permettant d’évaluer, d’agir pour améliorer la performance, ou de conduire le changement.
Le premier but du management visuel est de mettre à la disposition des équipes de façon claire et actualisée toutes les informations qui pourraient leur être utiles pour prendre les décisions stratégiques au sein de l’entreprise. Le management visuel est un outil collaboratif qui sert à augmenter l’agilité et la créativité, et faciliter la prise de décision voire à influer positivement sur celle-ci. Un exemple simple peut être évoqué pour illustrer cette affirmation : dans un supermarché, placer des sucreries en évidence à côté des caisses est un acte qui relève du management visuel, dirigé vers le client. Le client est incité par la vision de ces friandises à effectuer un achat qu’il n’avait pas prémédité. Dans une entreprise, et en direction des collaborateurs, le management visuel prend d’autres formes, et vise à augmenter l’efficacité managériale et collective des équipes.
Les effets recherchés et obtenus par un management visuel efficace au sein d’une entreprise sont notamment :
De façon très prosaïque, le management visuel dans une entreprise, ou à la maison, est souvent matérialisé par des signalisations basiques (mais efficaces !). Par exemple le traçage au sol de lignes de couleur pour guider les foules dans un lieu public (hôpital), ou la liste de courses affichée bien en vue sur le réfrigérateur. Le public visé par cette signalisation aura tendance à s’impliquer naturellement et à prendre la bonne décision, au moment même où elle est requise (marcher le long de la ligne jusqu’au service recherché, ou partir acheter les denrées mentionnées sur la liste) et ce, sans qu’il y ait eu besoin de demander des informations à un autre intervenant (perte de temps, perte d’autonomie…etc). C’est en cela que le management visuel vise à provoquer la décision. Dans l’industrie le management visuel a naturellement trouvé sa place : utilisation de codes couleur, plans des ateliers, schémas d’utilisation des machines… Tous moyens qui visent à transmettre une information rapidement et efficacement.
Mais les fondamentaux du management visuel peuvent être appliqués à tous les domaines, y compris à celui des services, pourvu que l’on ait réfléchi à la pertinence des indicateurs que l’on choisira. La plupart des environnements professionnels ne permettent pas aux employés de comprendre où se dirige l’entreprise, quels sont les objectifs, quels sont les problèmes rencontrés : le but du management visuel est de dynamiser et favoriser les interactions en rendant ces informations visibles et compréhensibles. Il faut par le management visuel créer et animer un espace de pensée dans lequel tout acteur pourra se rendre compte des problématiques, et éventuellement agir en conséquence pour y remédier. Responsabilisation des équipes et implication de tous les collaborateurs sont au cœur de la démarche, pour créer une réelle efficacité organisationnelle.
Les technologies digitales actuelles sont un formidable outil d’application des techniques de management visuel, notamment dans le domaine des services intra-entreprise. Et même si les Post-It collés sur un tableau peuvent être un bon début, rien ne vaut un tableau connecté, un « wallboard », qui, actualisé en temps réel, deviendra un rendez-vous privilégié de la communication efficace, et agile ! entre les collaborateurs.
Les aspects « techniques » de cet outil digital sont la clé de son utilisation future : choix des formats visuels (Camemberts ? Frises ? Diagrammes ?), choix de la police d’affichage, des boutons d’action, des couleurs… un véritable travail de designer, qui sera couplé aux décisions concernant l’emplacement du/des écrans, de leur orientation (portrait ? paysage ?) et de leur type (tactile ou non ?).
L’heure est venue de conduire le changement et de manager et motiver les équipes par le management visuel. Mais par quoi commencer, quels outils choisir ? Après avoir mis en place une équipe chargée de réfléchir à la mise en œuvre de ce changement, il faut aborder les points clés :
Tout d’abord il convient de cerner les enjeux de cette démarche : quels objectifs sont poursuivis ? Quelles informations doivent être communiquées auprès des collaborateurs ? Ce management visuel sera-t-il informatif, ou bien interactif ?
L’identification des indicateurs de performance qui doivent figurer sur les affichages est ensuite une étape ardue : comment choisir ces indicateurs qui seront les mètres étalons des comportements des collaborateurs de l’entreprise ? Il faut garder à l’esprit qu’un nombre limité d’indicateurs sera plus efficace (pas plus de 5 par écran).
Puis il faudra rendre attractif la présentation et la lecture des indicateurs, éviter de trop charger le tableau de bord en informations, penser à l’ergonomie si l’écran est interactif. Enfin la question de la localisation de cet outil communicant est cruciale : sera-t-il placé dans un lieu de passage ? Dans une salle de pause ? Dans une salle dédiée ? Faut-il en mettre un seul, ou plusieurs ? Il doit être visible, et facilement utilisable.
Pour former ses équipes au management visuel le manager devra faire preuve de patience, d’inventivité et d’adaptabilité. Plusieurs réunions (possiblement chronophages, d’où l’importance d’une gestion du temps précise) devront être organisées pour définir les attendus, objectifs, et les indicateurs de performance. Un collaborateur expérimenté et motivé par la mise en place de ces nouvelles techniques de management dans son environnement de travail peut être facilitateur et force de proposition, un membre de l’IT aura les compétences techniques pour connecter le système aux organes de l’entreprise. Des outils annexes peuvent être amenés et utilisés : Mindmapping, arbre de résolution, diagramme des affinités…
Une fois les indicateurs décidés, les tableaux interactifs configurés et leur emplacement défini, reste à anticiper et désamorcer les éventuelles résistances. Communiquer autour de la mise en place du nouveau système, répondre aux questions, faire preuve de pédagogie. Et bien-sûr : utiliser le nouvel outil pour le faire vivre et se l’approprier, organiser la fréquence de mise à jour, répartir les tâches au sein de l’équipe des collaborateurs pour les responsabiliser. Rien n’empêche de commencer par tester l’efficacité du nouveau mode de communication sur un POC (Proof Of Concept) qui ne concernera dans un premier temps qu’un périmètre limité de l’entreprise. Un bilan de cette expérience limitée (Qu’est-ce qui a bien fonctionné ? Quels indicateurs ne sont pas pertinents ?…) permettra de déterminer ce qui peut être conservé, ce qui doit être abandonné, ce qui peut être amélioré.